DIEU-LE-FIT
Lacroix : Statistiques du département de la Drôme 1835
DIEU-LE-FIT
DIEU-LE-FIT (Castrum Deus fecit). - Il est agréablement situé dans la vallée de Jabron, au confluent de cette rivière avec le ruisseau de Faux, à l'est et à 29 kilomètres de Montélimar. C'est un chef-lieu de canton et la résidence d'une brigade de gendarmerie à cheval. Il y a un bureau de poste, un bureau d'enregistrement, une église consistoriale et une école normale protestante. La population est de 3,952 individus, dont 1,620 protestans. Il s'y tient un marché le lundi et le vendredi de chaque semaine et dix foires par an.
Le vallon qui forme son territoire est fort bien cultivé, et, à l'exception de l'olivier, on y trouve toutes les productions des cantons plus méridionaux ; mais, resserré entre les montagnes, ses récoltes ne suffisent point aux besoins des habitans. Ils suppléent avantageusement à cette insuffisance des produits agricoles, par le commerce et l'industrie, qui en font une des villes les plus riches et les plus intéressantes du département. Il y a des fabriques de draperies qui occupent habituellement 320 ouvriers, des fabriques pour l'ouvraison de la soie qui en occupent 315, et des poteries qui en emploient 740. Cette dernière industrie s'exerce aussi dans les communes voisines, et le nombre des établissemens et des ouvriers qui y sont employés augmente chaque jour encore.
L'ouverture d'une route départementale de Dieu-le-fit à Montélimar est une des causes de cette prospérité toujours croissante, à laquelle il ne manque, pour recevoir tous les développemens dont elle est susceptible, que d'ouvrir aux montagnes qui écoulent leurs produits sur cette ville un débouché plus facile, par des embranchemens dans le fond des vallées, et par l'achèvement de la route commencée à travers la montagne de Diogrâce.
L'ancienne enceinte de Dieu-le-fit, parfaitement conservée dans le vieux quartier qui avoisine l'église, atteste que ce n'était autrefois qu'un chétif village, qui s'est successivement étendu et peuplé sous l'influence vivifiante de l'industrie.
MM. Morin ont puissamment contribué à cet heureux résultat, en donnant, depuis des siècles, dans ce canton, dont ils ont été long temps et souvent comme une autre providence, l'exemple du travail et des spéculations utiles, uni à toutes les qualités morales qui n'ont cessé d'en faire une famille patriarchale.
Dieu-le-fit rappelle peu de souvenirs historiques ; il ne commence à en être question que dans l'histoire des troubles religieux du XVIme siècle. Ce fut un des lieux qui se déclarèrent les premiers pour la réforme, et la différence des religions fit naître de fréquentes querelles entre ses habitans et la garnison de Valréas, qui appartenait au pape. On en vint aux mains en juillet 1565 ; le combat fut sanglant, et il fallut, pour mettre un terme à ces désordres, toute l'autorité du vice-légat et du marquis de Gordes, gouverneur du Dauphiné.
Les catholiques s'étant emparés de Dieu-le-fit en 1573, Dupuy-Montbrun le reprit presque aussitôt.
A une petite lieue au nord-est de la ville, sur un chemin qui conduit à la chapelle de Saint-Maurice, on voit une grotte extrêmement curieuse, connue dans le pays sous le nom de Baume-Saint-Jeaumes. L'ouverture a 6 pieds de haut sur 3 de large ; mais à mesure qu'on avance dans la grotte, la voûte s'abaisse si fortement, le passage devient si étroit, qu'on n'y pénètre qu'avec peine. A une profondeur de 25 ou 30 pieds, on entre, par un portail assez semblable à l'ouverture de la grotte, dans un emplacement très vaste : c'est une espèce de salle carrée de 25 pieds en tous sens, dont la voûte est majestueuse ; on croirait qu'elle est l'ouvrage des hommes, tant elle est régulière. Les murs sont couverts de stalactites très variées de la plus grande beauté. Le pavé est inégal et formé d'énormes pierres de différentes dimensions. Il en est qui pèsent de 2 à 3 quintaux, et le limon dont elles sont chargées les rend très glissantes ; car, quoiqu'il n'y ait au-dessus de la grotte qu'un chemin public, et qu'on n'aperçoive ni source, ni réservoir, l'eau suinte constamment de la voûte, en déposant un sédiment calcaire : aussi y ressenton une très grande fraîcheur, qui ne permet pas d'y rester long temps. Cette grotte mérite, sous beaucoup de rapports, l'intérêt des naturalistes ; mais il est à propos de les prévenir qu'on ne doit pas y entrer avec un seul flambeau ; il serait bientôt éteint : il est prudent d'en avoir plusieurs, et d'en placer de distance en distance, pour établir un courant d'air et pouvoir respirer et observer à l'aise.DIE <-- Retour à l'index --> DONAT (SAINT-)